Infundibulum Scientific

LE COMBAT POLITIQUE DE GABRIEL CELAYA DANS CANTOS IBEROS ET LO DEMÁS ES SILENCIO

El compromiso político de Gabriel Celaya en Cantos Iberos y Lo demás es silencio

The political fight of Gabriel Celaya in Cantos Iberos and Lo demás es silencio

Kouassi Mathieu KOUASSI
Doctorant
Université Félix Houphouët-Boigny

Mots-clés, Keywords, Palabras clave

Régime franquiste, engagement politique, poésie sociale, militantisme, injustices sociales,
Régimen franquista, compromiso político, poesía social, militantismo, injusticias sociales,
Francoist regime, political engagement, social poetry, militancy, social injustices,

TEXTE INTÉGRAL

Introduction

L’avènement de la Seconde République en Espagne, en 1931, sonne le glas de la monarchie des Bourbons qui peinaient à restaurer l’ordre et la stabilité nationale (P. Nourry, 2015). En effet, la monarchie faisait face à des troubles sociopolitiques à cause des conditions misérables de vie et de travail des populations. À cela s’ajoutent le séparatisme basque et le sécessionnisme catalan[1]. Cette république est perçue par les classes moyennes et défavorisées comme une lueur d’espoir, car elle met en œuvre des réformes et programmes sociopolitiques qui favorisent les couches déshéritées. C’est donc un bouleversement total de la société espagnole. Il s’agit, entre autres, de la réforme agraire, de l’égalité entre la femme et l’homme quant au droit de vote, de la réforme du travail, de la reconnaissance du mariage civil, de la légalisation de l’avortement, etc., (R. Carr, 1988). Mais cet espoir est anéanti par un désordre institutionnel dû au radicalisme, aussi bien chez les Républicains de Gauche et de Droite, que chez les Conservateurs proches de la monarchie qui conspirent à renverser et étouffer le système. Cette cacophonie sociopolitique va conduire le pays vers le gouffre et la catastrophe en 1936. Comme tous les conflits, la Guerre Civile (1936-1939) a laissé de lourdes conséquences dans tous les domaines de la société espagnole (K. M. Kouassi, 2021). Ainsi, c’est une Espagne dévastée qui sort de cette conflagration.

Mais le général Francisco Franco prend le pouvoir en 1939 et adopte une politique de vengeance, d’exclusion et de contreréforme (S. Riesco et F. Rodríguez, 2020). En plus, les réformes politiques et socioéconomiques entreprises par le pouvoir dictatorial franquiste vont empirer la situation du pays, fragilisant ainsi la cohésion sociale. Les classes populaires et ouvrières vivent dans la pauvreté, en plus de supporter la famine et la répression brutale générée par les appareils idéologiques et répressifs du régime franquiste (M. A. Arco, 2020). Les intellectuels sont réduits au silence, les medias proches de l’opposition sont censurés, les partis politiques et les syndicats supprimés, restant uniquement ceux qui sont proches du régime et qui font sa propagande. En plus, l’Espagne vit dans la crise économique, la corruption, le népotisme, la haine, la vengeance et la division (G. Gómez, 2017). Face à ces pratiques sociopolitiques d’un autre âge, bon nombre d’intellectuels et écrivains se sont résignés au silence. Il s’agit notamment de la majorité des intellectuels et écrivains de la Génération de 1927 (L. Luis, 2010). Pour échapper aux menaces et à la répression, d’autres ont pris le chemin de l’exil forcé, comme ce fut le cas de Rafael Alberti, Luis Cernuda, Pedro Salinas, etc. Les pratiques totalitaires et dictatoriales du franquisme sous lesquelles les populations croupissent vont faire l’objet de consternation, de dénonciation et de contestation de la part des poètes sociaux dans les années 1950. La poésie sociale, à la différence de celle de la Génération de 1927 et de la poésie classique, dénonce les dérives totalitaires du régime franquiste (D. Alonso, 1952). C’est dans cette logique que s’inscrit la poésie sociale de Gabriel Celaya, surtout Lo demás es silencio (1952) et Cantos iberos (1955). Mais au-delà de cette dénonciation, Celaya prône la solidarité, la paix, l’union, le patriotisme, etc. Avec un langage familier traité de prosaïsme par José Miguel de Azaola, Carlos Bousoño et Carlos Barral (A. Chicharro, 1996) et dépourvu de toute musicalité, Gabriel Celaya galvanise les masses populaires pour combattre le franquisme, ce qui traduit, bien évidemment, son engagement politique par le truchement de l’art poétique. Comment le combat politique de Celaya se manifeste-il au travers de ses deux productions artistiques ? Quelles sont les caractéristiques de sa production poétique dirigée contre le régime franquiste ? Pour mieux saisir cette étude, nous pouvons supposer que la poésie sociale de Gabriel Celaya est une arme de combat politique, un hymne patriotique capable de transformer sa patrie en détresse.

Nous étudierons ces deux œuvres en nous appuyant sur la méthode thématique pour montrer la détermination dans l’engagement politique de Celaya à travers la poésie sociale. Autrement dit, nous allons dé(montrer) comment Celaya combat le régime franquiste à travers ces deux recueils poétiques afin de le renverser par la révolution sociopolitique. En effet, la méthode thématique étudie ou analyse les thèmes abordés par un auteur dans une œuvre littéraire dans la mesure où tout texte littéraire repose sur un tiroir de thèmes (M. Collot, 1988 ; R. Luperini, 2013 ;  P. N’da, 2015). Nous signalons que la première partie de notre étude traitera de l’idéologie et la conception politique celayenne et la seconde s’appuiera sur le militantisme, le patriotisme, la résistance et la solidarité politique de Celaya.

 

  1. Idéologie et conception politique chez Gabriel Celaya

Gabriel Celaya, tout comme la majorité des poètes sociaux, a adhéré au Parti Communiste (PCE) d’Espagne (M. A. Harris, 1991 ; F. Krutwig, 2019). Épousant également l’idéologie de Karl Marx, il tente de matérialiser les idéaux marxistes pour la reconstruction de l’Espagne en proposant des solutions, en l’occurrence, la révolution sociopolitique qui doit être menée par tous ceux qui se sentent opprimés et discriminés (E. Luna, 1986 ; G. Celaya, 1993, 1999). C’est d’ailleurs cette adhésion qui lui a valu de nombreuses attaques de la machine répressive du gouvernement franquiste, car en fait, son œuvre poétique constitue une forme de rébellion contre les dérives du franquisme :

Vers la fin des années 1950 […] son militantisme communiste [Gabriel Celaya] s’intensifie […] Son militantisme communiste devient de plus en plus intense pendant ces années au fur et à mesure qu’il l’affiche, des années pendant lesquelles les dirigeants de l’opposition politiques annoncent périodiquement les signes du déclin du franquisme. […] A cause de son activité poétique et politique dans une situation politique pareille à celle que l’Espagne traversait, Celaya est victime de la répression directe du régime…non seulement de la censure…mais aussi des amendes gouvernementales. (A. Chicharro, 2007, p. 38-40).[2]

La poésie de Celaya, bien qu’orientée vers la classe ouvrière, est principalement dirigée vers l’action politique, car le but principal de son combat est de faire chuter tout le système franquiste afin de restaurer la liberté et le bonheur de l’Espagne toute entière, un pays où le chaos prospère à tous égards. En effet, Celaya défend les valeurs du communisme et exhorte le peuple espagnol à se désolidariser du capitalisme franquiste malgré tous les dangers auxquels il s’expose. C’est pourquoi Gabriel Celaya dénonce les exactions du franquisme dans ses poèmes. En effet, il conçoit la politique comme un outil aux mains du poète, capable de transformer la société. Ainsi, il s’engage à lutter contre la misère et la famine qui gangrènent l’Espagne. Mieux, il accuse les autorités franquistes d’en être les responsables. Le combat politique de Celaya se présente comme un appel à la liberté et à la paix, car c’est en ces valeurs que le pays pourrait retrouver sa grandeur et sa marche vers un état de droit, la justice sociale, l’équité et l’égalité des chances :

-Cuando pienso en las penas pequeñitas y absurdas

(por ejemplo, estos niños que hoy no comen son míos)

que nadie toma cuenta mas yo tomo en mi canto

pues esto debería trastornar todo el orden

por minúsculo y vano que lo juzgue el conjunto; 

                                      (G. Celaya, 1977, P. 45)

 

Sus ojos son terribles; […]

¡La libertad, la libertad! –se canta

como una transparencia que se ha despojado un ala.

Mas la justicia y la paz

tenemos que edificarlas con nuestro esfuerzo a compás.

 

Hay milagros

que podemos hacer con nuestras manos.

En la inerte vaguedad,

levantemos ese pulso de un jardín no original.

 

¡Manos a la obra!

Entremos en cuerpo y alma por el surco de la historia.

No llamemos belleza a ese triste equilibrio.

De la naturaleza que repite sus giros. […]

 

La justicia no regalo.

Hay que hacerla cada día golpeando y golpeando.

La libertad se conquista.

Tenemos que conquistarla remordiendo nuestra vida.

 

La paz que todos queremos.

Hay que robársela al cielo.

¡Camaradas, sed activos!

Y haréis real la estructura que anticipan vuestros gritos!

 

Nuestra España de verdad.

Nuestra España nada menos; nuestra España, nada más.

                                                        (G. Celaya, 1976, p. 29-30)

 

Dans ces passages ci-dessus, nous percevons clairement la volonté de Gabriel Celaya d’exhorter le peuple à l’engagement politique contre le régime franquiste. Il ajoute que la liberté ne s’octroie pas, mais au contraire, elle s’arrache au prix de l’effort et de la souffrance, car seule la lutte libère. Comme l’enseigne l’idéologie marxiste, la lutte devient un devoir et un droit fondamental si l’on veut se débarrasser d’un régime oppresseur. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il encourage ses semblables à ne point se résigner face aux difficultés rencontrées sur le terrain de la lutte politique, même si cette lutte âpre engendre souvent de nombreuses victimes. En tant que promoteur de la poésie sociale, Celaya prône le changement à travers l’expression poétique, en mettant l’art au service du peuple asservi et assujetti. En clair, il incite la population à la conquête du bonheur au prix même de leur vie pour ainsi contribuer à la reconstruction de la nation. C’est pourquoi, son combat politique, se met au service de la paix et de la libération nationale.

 

  1. Militantisme, patriotisme, résistance et solidarité politique de Gabriel Celaya

L’engagement politique de Celaya se traduit par un appel aux partis de l’opposition au pouvoir franquiste à mener une lutte commune à travers des actions concrètes et fortes pour annihiler son régime. Sa stratégie est la dénonciation des torts que subissent les Espagnols dans le but de confondre le gouvernement franquiste dans les medias parallèles et clandestins, dans les villes et dans les campagnes. À l’international, Celaya met en exergue des faits réels qui constituent des preuves pouvant accabler le régime devant les organismes internationaux. Ainsi, étant bien conscient de la mainmise du régime franquiste sur la scène politique nationale, le poète exhorte toute l’opposition à la nécessité de combattre dans l’union et dans la solidarité, car en réalité, le faire en rang dispersé serait ouvrir une brèche à l’ennemi pour consolider son pouvoir et imposer son hégémonie. Ce qui conduirait, de facto,  à un échec politique de l’opposition et sa fragilisation définitive.

L’engagement politique de Celaya s’inscrit aussi dans un élan de militantisme très poussé. De ce fait, l’usage excessif du vocable « camaradas » dans ses œuvres semble être une réelle obsession face à son désir de libérer son peuple de la dictature. Voici quelques extraits des poèmes « Todos a la una », « Todo está por inventar », «Los niños nos miran de frente », « Mañana será otro día» et « Vivir para ver » aux pages 45, 46, 47, 49, 54, 63 et 64 :

¡Camaradas!,

salvemos las distancias,

venzamos las nostalgias.

Nuestras manos obreras, todos a una,

darán forma a la esperanza. […]

 

¡Camaradas!

Nuestra lucha es eficaz.

Vencedores o vencidos, salvamos la libertad,

la dignidad de ser hombres […]

 

¡Camaradas, a luchar! […]

 

¡Camaradas, seamos

dignos de esa mirada! […]

 

Y el saber que no pueden

matarnos, que si tratan

de matar estos brotes,

crecerá nuestra rabia, […]

mi canto, camarada,

nos arma de paciencia,

nos da valor, nos salva. […]

 

Camarada, quisiera deciros: «No estáis solos ».

Quisiera que encontrarais en mis versos el eco

del latido secreto que todos nos sostiene,

nos salva en conjunto con una fe y mil rostros. […]

 

Escuchad, camaradas, mis poemas iberos

de hombre que, recorrido por vuestras mudas vidas […]

promover con versos de conmovida urgencia. […]

                                                             (G. Celaya, 1976)

Dans ces vers ci-dessus mentionnés, nous notons la motivation de Celaya à lutter contre le régime franquiste. Nous remarquons qu’avec l’usage des verbes d’action et le mode impératif, le poète tente de galvaniser ses camarades et militants politiques. En d’autres termes, il ordonne aux populations de se révolter contre le système franquiste. Il veut de ce fait, que le peuple espagnol exprime sa colère et son indignation face aux pratiques déshonorantes du franquisme pour restaurer et sauver la dignité, la liberté, la paix, car c’est une urgence politique et idéologique qui s’impose à l’Espagne.

Celaya a toujours épousé la cause et les idéaux de la République tel que le patriotisme. D’ailleurs, pendant la Seconde République espagnole, il était en collaboration avec les autorités républicaines. C’est ce qui l’a poussé à prendre les armes aux côtés des soldats républicains pendant la Guerre Civile. En fait, il est complètement opposé à la monarchie, au capitalisme et systématiquement contre les valeurs catholiques. Ce sont ses penchants et sa vision socialiste, communiste et marxiste du monde qui vont l’encourager à combattre sans relâche le franquisme. Il opte ainsi pour la démocratie et rejette en bloc la dictature de Francisco Franco :

 D’un point de vue structurel, rien n’avait changé dans notre pays : le mode de production capitaliste était toujours dominant. La voix de Celaya s’élève pendant cette période pour défendre, d’un point de vue culturel, le républicanisme culturel, y compris le modèle politique républicain. Pour cette même raison, il s’attaque à la « poésie officielle » et, par elle, au régime totalitaire et à l’idéologie mystico-impériale et national-catholique qui fait sa propagande, pleine d’éléments idéologiques féodalisants. (G. Celaya, 1990, p. 17)[3]

Nous notons également une résistance notoire contre le franquisme chez Gabriel Celaya tant dans ses propos pendant des meetings que dans ses discours poétiques. Nous en voulons pour illustration les nombreux usages des symboles et du langage communistes tels que « rojo, camaradas, lucha, revolución, revolucionario, cambio » le plus souvent accompagnés de l’impératif « levantad, avanzad, caminad, combatid » tout au long des deux œuvres que nous étudions. Ces termes sont l’expression des mots d’ordre qu’il donne aux militants et aux sympathisants du PCE. Cet usage est également le reflet de la résistance et du militantisme de Celaya. En lisant profondément Lo demás es silencio (1977), nous nous rendons bien compte de la dimension élevée de l’engagement du poète dans l’arène politique afin de galvaniser les plus récalcitrants et dubitatifs à rejoindre le combat politique dirigé contre le dictateur Franco. C’est pourquoi, dès l’entame de sa prise de parole (G. Celaya, 1977, p. 65-67), le premier mot du « Mensajero » a été « camaradas » pour interpeler et attirer l’attention du « Protagonista » et du « Coro »[4] sur l’importance de son message avant de s’insurger en donneur d’ordres tout le long de ses interventions :

Camaradas, yo no vengo

para mandar desde fuera.

Cuando mis pasos retumban,

redobla vuestra conciencia. […]

 

Ser hombre es saber que el mundo

no esta dado ; que se crea. […]

Somos hombres, inventadores,

espanta-dioses, conciencia.

Camaradas, todo es simple. […]

 

¡A la eh!

Que los trabajadores

se pongan a una en pie.

Levantad el orgullo

De ser quien sois, abruptos.

Sed honrados. Sed duros.

Sois hombres y eso es mucho. […]

¡A la eh!

Que los trabajadores

se pongan a una en pie.

Caminad todos juntos.

Combatid sin perdones.

Yo anuncio un evangelio

que callaban los dioses.

                       (G. Celaya, 1977, p. 68, 69, 70, 74)

Le militantisme de Celaya n’est qu’un secret de polichinelle. C’est d’ailleurs pour cela qu’il a été victime de nombreuses attaques de la part de la machine répressive du gouvernement franquiste (A. Chicharro, 2007). Si Celaya use de la poésie comme arme de combat antifranquiste, c’est parce que la poésie sociale tout comme le roman social et le théâtre social a été l’une des branches de la lutte politique clandestine menée par l’opposition dans la décennie 1950. Elle servait de canal de transmission de messages politiques et idéologiques pour déconstruire la propagande du régime franquiste. C’est en tout cas ce que révèle Antonio Chicharro:

Mais jusqu’à présent, le courant poétique de la poésie sociale, qui a eu de la reconnaissance et la propagation en son temps, a eu à supporter nonobstant les critiques disproportionnées et intéressantes dans une Espagne encore en guerre silencieuse pendant les années 1950, en cristallisant en elle  ce qu’on a appelé la culture de la résistance, comme preuve de cela, pas mal de ces poètes ont milité dans le Parti Communiste d’Espagne ou bien ont été « des compagnons de lutte » de ce parti. Ce n’est pas étonnant que ladite organisation politique qui a payé, dans la clandestinité pendant des décennies, le plus lourd tribut de l’opposition au régime franquiste, finisse par reconnaître ce courant créatif du réalisme social, dans lequel s’inscrivent aussi bien la poésie sociale que le roman, le théâtre, l’art et le cinéma sociaux. Ainsi donc, ce courant a eu le soutien programmatique du Parti Communiste d’Espagne, l’un des partis communistes les plus hétérodoxes par rapport à la toute-puissante l’Union Soviétique d’alors. (A. Chicharro, 2009, p. 84).[5]

Cette arme se veut anticonformiste et balaye tous les tabous qu’impose la poésie classique dite « pure ». Ainsi dans ce combat, le poète social doit jouer pleinement sa tâche dans la révolution en éveillant les consciences endormies par le mensonge politique. Il doit user de tout ce dont il dispose pour transformer la société en enfreignant les lois et les prescriptions imposées par la poésie classique (L. Luis, 2010). Face aux situations de dérives despotiques érigées contre la population, se pose l’urgence de sauver cette immense majorité à travers la force de l’art et de la parole de l’intellectuel sous forme de revendication du droit et de la justice pour tous. L’analyse approfondie de Scarano vient conforter cette thèse :

L’œuvre de Gabriel Celaya (Saint Sébastien, 1911-1991) consolide une formation poétique, émergente contre la dictature franquiste dans pendant l’après-guerre espagnol, qui nous permet de reconstruire un espace de positions distinctes à partir de ses auto-poétiques en prose et méta-poèmes. Pour Celaya, le devoir-être du poème est dialogique et perlocutionnaire : il fait et parle. Parler est dans son imaginaire, dire aux autres, converser avec l’altérité, échanger. Faire c’est agir par la parole, influencer le milieu social, interférer dans les ordres dominants, répliquer aux impositions du régime, même lorsqu’il se fait de manière étroite en termes réels. (L. Scarano, 2016, p. 35).[6]

L’œuvre poétique celayenne constitue une forme de rébellion contre les dérives du franquisme. C’est justement pour cette raison que Gabriel Celaya s’engage à combattre politiquement et culturellement le système franquiste (G. Celaya, 1975, 1990, 1993). En fait, il use de la poésie comme un canal de diffusion de l’idéologie marxiste, ce qui fait de lui « un poète-politicien » et vice-versa.

Par ailleurs, le militantisme de Celaya au sein du communisme l’a même poussé à se présenter en tant que candidat aux élections sénatoriales pour le compte du PCE : « En 1977 il s’est présenté comme candidat du Parti Communiste d’Espagne au Sénat pendant les premières élections sénatoriales dans la province de Guipuscoa.   »[7] (G. Celaya, 1993, p. 20). Dès lors, la poésie sociale celayenne s’est mise au service de l’action politique. C’est durant ces années, qu’il répétait incessamment que la poésie est une arme chargée d’avenir. Cette thèse se résume dans le poème « La poesía es un arma cargada de futuro » où la poésie est une arme chargée et pointée sur l’oppresseur pour libérer les opprimés et garantir la cohésion sociale dans un environnement de confiance entre les uns et les autres malgré leur différence :

Cuando ya nada se espera personalmente exaltante […]

 

cuando se miran de frente

los vertiginosos ojos claros de la muerte,

se dicen las verdades:

las bárbaras, terribles, amorosas crueldades.

 

Se dicen los poemas

que ensanchan los pulmones de cuantos, asfixiados,

piden ser, piden ritmo,

piden ley para aquello que sienten excesivo. […]

 

Poesía para el pobre, poesía necesaria

como el pan de cada día,

como el aire que exigimos trece veces por minuto,

para ser y en tanto somos dar un sí que glorifica. […]

 

Maldigo la poesía concebida con un lujo

cultural por los neutrales

que, lavándose las manos, se desentienden y evaden.

 Maldigo la poesía de quien no toma partido hasta macharse. […]

 

Quisiera daros vida, provocar nuevos actos,

 y calculo por eso con técnica qué puedo.

Me siento un ingenio del verso y un obrero

Que trabaja con otros a España en sus aceros.

 

Tal mi poesía: poesía-herramienta

a la vez que latido de lo unánime y ciego.

tal es, arma cargada de futuro expansivo

con que te apunto al pecho.

 

No es una poesía gota a gota pensada.

No es un bello producto. No es un fruto perfecto. […]

 

Son palabras que todos repetimos sintiendo

Como nuestras, y vuelan. Son más que lo mandado.

Son lo más necesario lo que no tiene nombre.

Son gritos en el cielo, y en la tierra, son actos.

                                                         (G. Celaya, 1976, p. 57-58)

En lisant ces vers, nous remarquons la vision poétique et la mission que Celaya assigne à la poésie sociale, c’est-à-dire, la poésie au service du peuple. Pour cela, le poète doit s’engager davantage pour accomplir cette mission en se rangeant au côté du peuple et rejeter l’indifférence face aux problèmes sociopolitiques. Dans sa mission, il a la responsabilité de dire la vérité en dénonçant les injustices de la société pour fortifier et réconforter les populations en détresse. Le faisant, il se fond dans la masse pour rétablir l’équité, la justice sociale, l’égalité politique et garantir la paix et l’unité nationale.

De même, le combat politique de  Celaya se perçoit par la pratique d’une poésie dissidente qui s’insurge contre la dictature de Franco qu’il qualifie de régime liberticide. Ainsi, pour lutter efficacement contre ce système, Gabriel Celaya et sa confidente Amparo Gastón ont créé une maison d’édition pour publier les œuvres qui dénoncent et condamnent les infractions du système franquiste : l’Editorial Norte. L’objectif principal de Norte est de dénoncer avec virulence l’autoritarisme du pouvoir franquiste. Avec Norte, Celaya rompt définitivement avec la poésie traditionnaliste et s’ouvre à une rénovation poétique capable d’aborder ce qu’on dénonce dans les rues « hablar de lo  que todo el mundo habla en la calle » et utiliser un langage direct, prosaïque « directo, prosaico, y convencional » accessible à tous (G. Celaya, 1975, p. 22-23). Comme nous pouvons le constater avec l’analyse de Chicharro, Norte constitue un foyer de résistance et de rébellion clandestine entretenue par Gabriel Celaya et le PCE en exil:

L’Editorial Norte dont le siège se trouve à Parte Vieja de Saint Sébastien, ne s’est pas limité à la simple activité éditoriale, sinon elle s’est convertie lentement en un noyau d’activité politique clandestine et parallèlement en un noyau de la poésie social. Virgilio Garrote, Jorge Semprún, Blas de Otero, Eugenio de Nora et autres  y sont passés. Certains persécutés communistes y ont eu une éventuelle protection et certains écrivains qui sont devenus aujourd’hui célèbres y ont trouvé refuge pour passer la nuit…on y distribuait certaines revues françaises de l’époque de l’orientation marxiste. (A. Chicharro, 2007, p. 31).[8]

Celaya est conscient du fait que la dénonciation de la situation chaotique du pays (L. Scarano, 2011) et la proposition des solutions alternatives est la condition sine qua non de la réussite de sa lutte politique. C’est en ce sens qu’il s’active à galvaniser l’action de la masse en rejetant l’inaction, la neutralité et l’impartialité de l’artiste face aux urgences du moment, car la liberté et l’état de droit se trouvent au bout de l’effort. De ce fait, devant la gravité de la situation, Gabriel Celaya incite les Espagnols à l’héroïsme. Les poèmes « La necesidad, la sencillez, la alegría» et « Vivir para » en sont une illustration :

He aprendido a cantar

lo mucho que en lo poco que soy se exalta a gloria,

clama realidad,

golpe a golpe en mi pecho va ganando libertad.

 

La libertad forzosa,

la libertad del hombre que no cabe en sí mismo:

el heroico crecerse en el destino. […]

 

¡Distancias, espejismos! Hablemos despacito

del mundo que así cambia, dando vueltas, brillando

del pasado al futuro, del futuro a esa anchura

que se mira a sí misma sin decir lo que piensa,

propone, indefinida y absuelta, lo absoluto

con forma de muchacha simplemente bonita,

con versos simplemente felices que en la nada

rubrican la ironía con su líquido brillo.

 

Tal fue la poesía real y delirante

que ayer me fascinaba, sorbiéndome en sus giros.

Tobogán de caricias verso a verso cursadas

como una vuelta larga que resbala a trozo

de pueblo palpitante, voraz, real, violento

que hoy recojo caliente y el mar borra extendiendo.

Tal fue, nunca mordida, la evidencia increíble

Que se rizaba al rizo con bucles de belleza.

                                     (G. Celaya, 1976, p. 28, 59)

Au-delà de la dénonciation et de l’héroïsme, Celaya condamne l’inutilité de la poésie classique, dite « pure », car il la trouve inefficace et loin des réalités quotidiennes des populations. En d’autres termes, cette poésie ne présente aucun intérêt pour les ouvriers, le prolétariat, les intellectuels, les désœuvrés, etc. Pour ce faire, il demande aux adeptes de la poésie pure de lui rendre compte, car ils font « honte » à la société :

A veces me parece que os debo pedir cuentas,

no por mí, por aquellos que dejasteis sin habla

y estaban ya cargados de terrible evidencia

cuando dabais por buenas las técnicas, exactas

bellezas de unos versos que ahora nos avergüenzan,

pues ya entonces lloraban los niños que os callabais,

maldecían los hombres que hoy siguen maldiciendo,

y vosotros, al margen os lavabais las manos. […]

 

Camaradas de un día, celestes en la ausencia,

la lírica absoluta, la clara permanencia […]

Valéis, broma de veras, lo que vale un poema,

un ave inverosímil cogida no sé cómo

con la trampa de un verso, con una burla bella.

                                                (G. Celaya, 1976, p. 61)

Pour Celaya, l’homme a le droit et le pouvoir de changer son destin, son avenir même si les conditions matérielles constituent un obstacle permanent face à l’objectif à atteindre. C’est pourquoi il invite ses pairs à faire face aux défis politiques qui s’imposent à eux afin de matérialiser les aspirations du peuple espagnol. En fait, le poète de Biscaye se sent angoissé et terrifié par les tares sociales sous le franquisme, car une partie de l’Espagne (les franquistes) rend esclave l’autre partie (les républicains) dans la mesure où les partis ne défendent pas les mêmes valeurs. C’est pour ces motifs que Celaya pousse un cri de cœur alarmant pour dénoncer avec rigueur ce désastre qui ne fait que les opposer inutilement (M. Ifach, 1965).

Gabriel Celaya dans son combat contre le franquisme dénonce l’hypocrisie du régime qui ment à l’opinion internationale et manipule la population espagnole dans les medias en ignorant la division, la haine et l’exclusion sociopolitique. Cette exclusion constitue une entrave à la justice sociale puisqu’elle est la base même de l’injustice et de la stigmatisation d’une grande partie de la population. C’est fort de cela que Celaya critique avec sévérité le régime tout en proposant des solutions idoines : « A la fiesta, / a la fiesta, / ¡viva la gala! / ¡Ay, cómo me besabas, / morena mala! / ¡A la fiesta a la flor! / Que tus ojos relucen, / los otros no. » « Propongo sin blanduras, / pensada y positiva, / una nueva manera de justicia. / No será ese calmante / que le saciado administra / al rebelde como una medicina » (G. Celaya, 1977, p. 53; 73). C’est pour cela que « le messager » el mensajero condamne la mauvaise répartition de la richesse du pays dans presque tout le recueil poétique Lo demás es silencio, (1977). À y voir de près, on note que les richesses du pays ne font que profiter qu’à un seul clan, car seuls les partisans du régime vivent heureux.

L’engagement politique de Celaya réside dans l’encouragement de ses semblables à la révolution politique pour la libération nationale. En effet, pour Celaya, c’est l’engagement politique qui pourra créer les conditions d’une paix durable et poser les bases du développement du pays. C’est pour cette raison, qu’il reconnait que c’est dans l’amour, la bravoure, la force, la vivacité, la vaillance, la hardiesse et surtout la solidarité que les Espagnols viendront à bout du système dictatorial franquiste : « A la una, a las dos, / las manos laboriosas / y el pedal motor ; / estampante, el pilón. / A la una, a la las dos, / trabajamos con sangre, / con acero y sudor, / con duras herramientas, / con físico furor » (G. Celaya, 1977, p. 107).

Face aux désordres et à l’anarchie créés par l’autoritarisme et l’absolutisme du régime « […] con esas rebeliones que son como la fiesta […] Minúsculas campanas / que destilláis el frío / -patatín-, sacudid / -patatán- el hastío. / Las golondrinas rayan / con su zig-zag el vidrio.» (G. Celaya, 1977, p. 52; 55), Celaya trouve qu’il est impérieux de s’interroger sur la nécessité de la responsabilité des leaders d’opinion, des responsables des partis politiques et des groupements associatives. Ici, le poète montre que le pouvoir franquiste se construit sur les résidus de l’anarchie et du chaos et que la politique franquiste est totalement inutile, car elle s’avère impuissante face aux enjeux de la réconciliation nationale.

L’une des dernières stratégies de Celaya c’est de mobiliser tous les acteurs et les forces politiques du pays pour créer un climat de transition politique. Il fait un appel à tous les partisans et sympathisants de l’opposition à se joindre au combat engagé contre Franco (Otero, 2014) qui s’est accaparé le pouvoir d’état. C’est pour cela que l’engagement politique celayenne s’apparente aux idéaux socialistes et marxistes dûs au mépris du capitalisme :

!Allá va

la riada del pueblo

como un canto triunfal!

La dicha es colectiva;

La gloria, general. […]

Aventad el incienso

de lo tradicional.

Romped el mecanismo

de interés-capital. […]

        ¡Golpead!

 La riada del pueblo

va hacia el bien por el mal

y, entre escombros, levanta

el nuevo hombre social.

                                  (G. Celaya, 1977, p. 77)

 

 

 

 

Conclusion

Agacé par la répression et la violence sur toutes ses formes, avec son corollaire de crainte, d’exil, de famine, de misère, de pauvreté, de chômage, de mort, etc., le poète basque accuse le régime franquiste d’en être l’instigateur et le responsable. En effet, le franquisme qui s’est fondé sur les ruines de la Guerre Civile a imposé aux populations la démagogie politique, le banditisme, la criminalité, la délinquance juvénile, l’insécurité, la corruption, la médiocrité, etc. Ainsi, pour lutter efficacement contre ces pratiques contre-nature, Gabriel Celaya profite de son adhésion au Parti communiste d’Espagne pour combattre tout l’appareil étatique espagnol de l’après-guerre. Ce qui le pousse à présenter l’Espagne comme un territoire où règnent le chaos et l’anarchie. Le poète tente de démontrer que, voulant asphyxier l’opposition par le musellement et l’exil, le régime s’est, de plus en plus, retrouvé face à des opposants mieux structurés et réorganisés clandestinement par l’infiltration des syndicats et des groupements apolitiques. L’engagement politique de Celaya vise à paralyser les secteurs clés de la vie sociale, économique et culturelle du pays notamment le système éducatif, les mines, le commerce, la santé, le transport, l’industrie et bien d’autres. C’est pour ce cela qu’il ne ménage aucun effort à inciter les syndicats et associations notamment la CNT, l’UGT et le peuple espagnol au boycott général et au sabotage de toute action et des projets du gouvernement afin de fragiliser et limiter l’autorité du pouvoir franquiste.

Nous retenons également que face à une Espagne en proie à la rivalité, à la manipulation, au mépris, à la haine, et à la division, par le combat politique, Gabriel Celaya veut exhorter les masses populaires à travers ses discours et ses actions concrètes pour envisager la réconciliation et l’unité nationale en bannissant définitivement la vengeance et les règlements de comptes. Malgré les vicissitudes et les tares qui minent la société espagnole, Gabriel Celaya redonne de l’espoir au peuple espagnol en l’incitant à croire aux valeurs de l’humanisme, au travail d’équipe et à observer un esprit de solidarité, de fraternité et de surpassement de soi.

 

 

Références bibliographiques

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[1] Les catalans et les basques recherchaient l’autonomie et la souveraineté en se séparant définitivement de la monarchie espagnole afin de créer leur propre royaume ou état. Le sécessionnisme catalan est toujours d’actualité même s’il a pris une nouvelle forme. Il est devenu une lutte beaucoup plus politique. Le séparatisme basque autrefois marqué par la violence est presque atténué grâce aux consensus et compromis entre l’état central espagnol et le groupe terroriste ETA.

[2]Texte d’origine: A lo largo de estos años finales de la década de los cincuenta […] su militancia comunista [Gabriel Celaya] se intensifica […] Su militancia comunista, como queda expuesto, se hace más intensa durante estos años, años en que periódicamente los dirigentes de la oposición política extienden una y otra vez actas de defunción del franquismo. […] Celaya sufre, dada su actividad poética y política en una situación política como la que por entonces atravesaba España, la represión directa del régimen…no sólo la censura…sino también las multas gubernamentales.     

[3] Texte d’origine: Desde un punto de vista estructural, nada había cambiado en nuestro país: el modo de producción capitalista seguía siendo dominante. La voz de Celaya se alza en estos momentos para defender, desde el plano cultural, el republicanismo cultural y, con él, el modelo político republicano. Por esta misma razón ataca a la «poesía oficial» y, en ella, al régimen totalitario y a la ideología místico-imperial y nacional-católica que propicia, plena de elementos ideológicos feudalizantes.  

[4] « El mensajero », « el Coro » et « el Protagonista » sont les personnages du recueil poétique de Gabriel Celaya Lo demás es silencio (1952). C’est une œuvre poétique exceptionnelle dénommée “la cantata”. C’est une poésie « dialoguée”.

[5] Texte d’origine : Pero hasta llegar a ese momento, la corriente poética de la poesía social, que conoció reconocimiento y difusión en su tiempo, hubo de soportar no obstante las críticas más dispares e interesadas en una España todavía en guerra silenciosa durante los años cincuenta, al cristalizar en la misma 1o que se ha dado en llamar la cultura de la resistencia, siendo prueba de ello que no pocos de aquellos poetas militaron en el Partido Comunista de España o bien fueron « compañeros de viaje » del mismo. No ha de extrañar por eso que dicha  organización política, que soportó en la clandestinidad durante décadas el mayor peso de la oposición al régimen franquista, acabara reconociendo esta corriente creadora del realismo social, en la que se inscriben tanto la poesía social como la novela, el teatro, el arte y el cine sociales. Así pues, esta corriente contó con el amparo programático del Partido Comunista de España, uno de los partidos comunistas más heterodoxos con respecto a la entonces todopoderosa Unión Soviética.   

[6] Texte d’origine : La obra de Gabriel Celaya (San Sebastián, 1911-1991) consolida una for­mación poética, emergente contra la dictadura franquista en el período de la posguerra española, que nos permite reconstruir un espacio de posiciones distintivas desde sus autopoéticas en prosa y metapoemas. Para Celaya el deber-ser del poema es dialógico y perlocucionario: hace y habla. Hablar es en su imaginario, decir a otros, conversar con la alteridad, intercambiar. Hacer es actuar por la palabra, incidir en el espacio social, interferir en los mandatos dominantes, replicar a las imposiciones del régimen, aun cuando se haga desde márgenes estrechísimos en términos reales.

[7] Texte d’origine : En 1977 fue candidato al senado por el Partido Comunista en las primeras elecciones generales, en la provincia de Guipúzcoa.

[8] Texte d’origine : La Editorial Norte, cuya sede estaba en la Parte Vieja de San Sebastián, no se limitó a la simple actividad editorial, sino que fue convirtiéndose paulatinamente en un núcleo de actividad política clandestina y paralelamente en un núcleo de la poesía social. Por aquí pasaron Virgilio Garrote, Jorge Semprún, Blas de Otero, Eugenio de Nora, entre otros. Aquí tuvieron eventual cobijo algunos comunistas perseguidos y lugar donde pasaron la noche algunos escritores hoy famosos… distribuían algunas de las revistas francesas de la época de orientación marxista.     

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