Infundibulum Scientific

LA QUESTION DE LA DOT ET DU « NSUA » DANS LE THÉÂTRE HISPANO-AFRICAIN : CAS DE EL HOMBRE Y LA COSTUMBRE DE PANCRACIO ESONO MITOGO

The issue of the dowry and the « Nsua» in African Hispanic theatre: case of El hombre y la costumbre of Pancracio ESONO MITOGO

La cuestión de la dote y del nsua en el teatro hispanoafricano: caso de El hombre ya costumbre de Pancracio ESONO MITOGO

N’GUETTIA Kouadio Narcisse
Université Alassane Ouattara
nguettiakouadionarcisse@gmail.com

Résumé

Mots-clés, Keywords, Palabras clave

Dot, nsua, femme, homme, paupérisation, famille.
Dowry, nsua, woman, man, pauperization, family.
Dote, nsua, esposa, hombre, empobrecimiento, familia.

TEXTE INTÉGRAL

Introduction

« La coutume, c’est l’homme»[1] (P. Esono Mitogo, 1990, p.54), nous dit le proverbe bantou annonçant toute la symbolique positive qui accompagne le dramaturge, dans sa vision de défendre les bonnes mœurs afrobantoues. La pièce de Pancracio Esono Mitogo offre une quantité d’allusions et références relatives à la dot espagnole et au « Nsua » guinéen. Dans le but de peindre le vécu quotidien de son milieu, Pancracio utilise une abondante matérielle pour mettre en relief certains traits culturels caractérisant sa technique dramatique. Soutenant cette assertion, V. Granados clarifie sur la couverture de l’œuvre que « les traits principaux de cette variété sont présentes dans la comédie […] l’auteur a écorché son œuvre de jugement et a reflété les coutumes de son village »[2]. (P. Esono Mitogo, 1990, page de couverture). D’où l’évocation de la dot espagnole et du « Nsua » guinéen dans El hombre y la costumbre.

La réaction de Pancracio sur ces pratiques culturelles est due au mauvais usage desdits procédés suscitant des polémiques entre les personnages du corpus. Si tel est le cas, que dit le théâtre de Pancracio face à la digression culturelle des personnages ? Comment la dot et le nsua sont-ils perçus dans le corpus ? Que représente la dot dans le système matrimonial des peuples ? Nous voulons montrer, à partir de cette étude, comment Pancracio dénonce la confusion et la mauvaise interprétation de la dot espagnole et du nsua de la Guinée Équatoriale.

La démarche de cette étude sera axée sur l’approche sémiologique, en faisant appel à la théorie de Greimas, dans l’analyse sémiologique, et aux instruments du spectacle de Patrice Pavis. Et ce, à partir de l’analyse des comportements des différents actants qui sont « celui qui accomplit ou subit l’acte, indépendamment de toute détermination ». (A. Greimas et J. Courtès, 1979, p.3). Ces principaux composants du théâtre hispanoguinéen représentent des symboles. Et chacun de leurs gestes renvoie à un signifié. D’un point de vue culturel et cosmologique, il est important de se pencher sur les symboles liés à certains personnages du drame, en tenant compte du modèle actantiel. Car,

La notion de modèle (ou schéma ou code) actantiel s’est imposée dans les recherches sémiologiques et dramaturgiques pour visualiser les principales forces du drame et leurs rôles dans l’action. Elle présente l’avantage de ne plus séparer artificiellement les caractères et l’action, mais de révéler la dialectique et passage progressif de l’un à l’autre. Son succès est dû à la clarification apportée aux problèmes apportée aux problèmes de la situation dramatique, de la dynamique des situations et des personnages, de l’apparition et la résolution des conflits […]. (P. Pavis, 1976, pp.2-3)

 

  Pour atteindre notre objectif, il sera question d’analyser la perception de la dot espagnole et du nsua par les personnages de la pièce, et la fonction sociale de la dot.

 

  1. Le sens de la dot espagnole et du nsua

          La question de la dot va au-delà des frontières de la tradition des peuples. La dot, c’est la clef qui ouvre la porte au mariage qui est un droit naturel. C’est pourquoi, selon le Compedium de la doctrine sociale de l’Église « Aucun pouvoir ne peut abolir le droit naturel au mariage ni modifier ses caractères et ses finalités. […], le mariage est doté de caractéristiques propres, originelles et permanentes ». (Compendium, 2008, p.125). Alors le mariage avec l’autre devrait pouvoir briser tout comportement susceptible de nuire au prochain. La dot qui est un acte naturel, traditionnel et ancestral très symbolique autorise le mariage entre deux(2) personnes de sexes opposés. Ce mariage n’est pas une simple union entre l’homme et la femme. C’est toute une multitude de société vitale qui est représentée en ces deux (2) sujets unis. Alors, chacun, à son niveau, symbolise la vie et l’amour de sa famille d’origine, de son clan, de sa tribu, sa région, son pays. Avec ces valeurs qu’incarne le mariage, les hommes ont institué des lois traditionnelles, dont la dot. Et ce, pour garantir l’union conjugale afin de la rendre plus authentique et le pérenniser, dans le temps et l’espace, pour la génération future. Cette pratique traditionnelle se déroule en public ; en présence de plusieurs personnes dont les membres de la famille, amis et connaissances des futurs époux. La présence de toutes ces entités symbolise leur complicité pour le bonheur des futurs mariés.

          Mais la conception de la dot diffère d’un peuple à un autre en tenant compte des exigences de la loi coutumière, tout en conservant sa valeur. Ici, la lumière est faite sur la confusion établie par la population de Medzap relativement à l’institution matrimoniale bantoue et la dot espagnole. En effet, cette population, soit par ignorance soit par mauvaise adaptation, se perd à la croisée des deux cultures. Ce qui suscite un vif débat public entre tous les acteurs du village de Medzap. Selon certains habitants de ce village, tout ce qui se passe de l’autre côté du monde peut être appliqué chez eux sans tenir compte de son enjeu ; ou même des conséquences que son application pourrait engendrer dans leur société.

          C’est d’ailleurs l’interpellation de Seydou Badian quand il dit : « Il ne s’agit pas évidemment de tout accepter. Mais faites un choix. Les coutumes sont faites pour servir les hommes, nullement pour les asservir » (S. Badian, 1976, p.143). De par la pensée de Badian, l’on comprend parfaitement que le fait de copier la culture des autres peuples n’est mauvais en soi. Mais l’idéal est de retenir la bonne pour l’édification du commun des peuples. Certes, la culture d’un peuple peut influencer ou remettre en cause celle d’autrui. Mais cela ne suppose pas un renoncement total à la sienne. Pour observer cette idée, Miguel, le chef du village de Medzap, conseille à son peuple en suivant la logique de Badian. Mais sous d’autres cieux:

MIGUEL: je pense qu’il n’y a aucun droit de mal traduire notre tradition. Je me réfère à la bonne tradition. Car, c’est ce qui permet à ceux qui ne nous connaissent pas profondément de mal parler de nous et condamner ce qui est bon et sacré chez nous. Et que, malheureusement, nous avons délaissé.[3] (P. Esono Mitogo, 1990, pp.38-39).

          Il semble avoir une légère contradiction entre la pensée de Badian et celle de Miguel. Le premier exhorte les siens à l’adoption d’un esprit critique dans leur manière d’agir face à la culture occidentale. Il ne s’oppose pas catégoriquement à la culture du colon. Mais il propose aux  Africains de retenir ce qui est bon des autres cultures et qui peut contribuer à leur épanouissement social et commun. Quant au deuxième, il suit la pensée de son prédécesseur en se focalisant sur la culture locale. Pour lui, les populations autochtones doivent d’abord maîtriser leurs us et coutumes avant de penser à les sabouler avec ceux des autres.

          Les deux pensées se rejoignent dans la mesure où leurs auteurs invitent les leurs à faire bon usage des lois coutumières sans se laisser influencer par la culture occidentale ou d’autrui. Aussi, ils leur font comprendre que ces lois établies par les ancêtres, sont faites pour le bien commun de toute la communauté. Et non pour leur anéantissement.

Suivant cette même logique, les personnages Pedro et Miguel font une nuance entre la dot des Espagnols et celle des Équatoguinéens qu’est le « Nsua ». Dans leur analyse, ils donnent une définition claire de la dot espagnole. Il le fait précisément sur la place publique de Medzap. Ce qui permettra à la population de bien comprendre leurs coutumes et celles des autres. Les répliques ci-dessous des personnages illustrent clairement la démarche du dramaturge :

          SANTIAGO : – Mais qu’est-ce que ça peut faire ? comme si les étrangers ne pratiquent pas les mêmes choses que nous. Qu’est-ce qu’ils appellent dot pour eux ?

             MIGUEL : eh bien ! La dot n’est pas notre « nsua ».

             SANTIAGO.- c’est quoi alors ?[4] (P. Esono. Mitogo : 1990, p.39).

          Contrairement à la dot selon la tradition bantoue, la dot espagnole, comme le signifie la réplique de Pedro, est :

PEDRO.- alors… le mot dot, de l’espagnol, provient du latin et signifie pour les européens, la fortune, l’argent et la quantité de biens que la famille donne à sa fille quand elle va se marier, ou après qu’elle soit mariée, pour quelle vive bien et heureuse avec son marie et ses futurs enfants[5]. (P. Esono. Mitogo, 1990, p.39).

           Si l’on s’attelle à la définition de Miguel, la dot, chez les Européens, est donnée par les parents de la fille qui va en mariage. Mais bien avant Pancracio, ce procédé culturel était défini dans le théâtre de Lope de Vega. Chez lui, les biens que donnent la famille à sa fille sont reçus comme le majorat féminin. « Pour cette raison, l’institution du majorat permet au père d’éviter une transition rapide et inespérée, dans sa succession comme chef de famille, afin qu’il ait assez de temps pour préparer son successeur ». (H. Ziomek, …, p.866).  Dès lors, le mariage est perçu comme une forme de liberté, d’émancipation et d’indépendance économique autant que matérielle, morale et spirituelle à la vue des parents géniteurs. Les biens matériels et les richesses que confèrent les géniteurs à leur fille lui permettront d’être plus indépendante à l’égard de son homme. Elle se servira de ces biens pour l’entretient de son foyer et de ses futurs enfants. En un mot, l’attribution de ces biens consistera à favoriser la subsistance et l’aisance du jeune couple. Cette manière de concevoir la dot est reçue chez J. Goody comme « la dot directe » (J. Goody, 1983, p.243). Le dramaturge guinéen remet en cause ce procédé matrimonial. Il estime que le système dotal européen est basé sur le bien matériel. Alors la « dot espagnole » peut être acceptée dans la société bantoue dans la mesure où elle n’est pas en contradiction avec le « Nsua ». La terminologie relative aux transferts des biens lors du mariage se précise selon la vision de chaque peuple donné. Si ce procédé matrimonial est nommé « dot » chez les Européens, les Bantous, quant à eux, ont une désignation particulière pour ce fait culturel : le « Nsua ».

           Le « Nsua » est l’une des conceptions emblématiques de la culture bantoue. Le « Nsua » semble être la dot telle que prescrite par les Espagnols, mais il a un sens particulier dans la culture guinéenne. Pour mettre fin à la chicane relative aux deux concepts, le chef de village, Miguel, donne des précisions relatives à ce sujet. Et c’est ce que Santiago et le Public cherchent à savoir. En guise de réponse Pedro et son adjuvant le chef Miguel précisent que : « cela n’est pas notre nsua. Notre nsua, au contraire, est actuellement, l’argent que la famille du jeune ou de l’homme donne, d’habitude, à la famille de la mariée qui vient d’être son épouse. Et ce, pour que le mariage, au niveau traditionnel, soit légitime, juridique et garanti »[6]. Contrairement à la dot espagnole qui est le transfert des biens, meubles et immeubles du père à la fille, le nsua se réfère à l’amande que l’homme doit payer aux parents de la femme. Le fait qu’un homme paie la dot à la famille de la femme est appelé, selon Feller, « la dot indirecte » (L. Feller, 2002, pp.18-125). Et c’est ce qui est recommandé au pays bantou de la Guinée Équatoriale. Dans la cosmogonie bantoue, les échanges dotaux, en situation matrimoniale, sont d’abord un geste symbolique de communion fraternelle. Mais ce symbole doit être matérialisé par un objet usuel de valeur tel que décrit par Miguel, le sage de Medzap :

MIGUEL : Notre « nsua » fut seulement un symbole traditionnel. L’on pouvait donner un sabre, un couteau, un métal ou un outil comme « nsua ». Le « nsua » se donnait en présence de deux tribus. Car, le mariage de la femme constituait une vraie union de tribus. Je dois souligner aussi que n’y avait pas de montant fixe.[7] (E. M. Pancracio, 1990, p.39)

          Le mariage qui est la constitution d’une nouvelle cellule doit être soutenu et encouragé par tous, car selon Feller, « la constitution d’une nouvelle cellule est l’occasion pour les deux groupes familiaux concernés d’établir des relations qui ne se limitent pas à l’échange des femmes, mais qui, profondément, signifient et renforcent leur alliance politique ou économique ». (L. Feller, 2002, pp.18-125). Cette pensée de Feller est recevable dans la tradition afrobantoue. Il est perceptible dans les sociétés africaines que les décisions et les normes ne se prennent pas de manière désintéressée. Tout est significatif. En dehors de l’argent exigé ou de l’objet tel qu’un couteau, un sabre, un métal etc., que l’homme paye pour le « nsua », il y a un autre sens spécifique qui valorise le mariage en Guinée Équatoriale. Cela ne vient pas du blanc mais fait partie intégrante des bons fruits de la sagesse des ancêtres. Pour cela, il est nécessaire de défendre cette loi relative au mariage africain et lui redonner sa valeur spirituelle et originelle. C’est ce que traduit l’intervention de Pedro et du chef Miguel. Le nsua, la modique somme que le gendre et sa famille présente aux parents de la fille ou la femme, n’est rien d’autre qu’un acte symbolique. Cette assertion est soutenue par Donato Ndongo, quand il dit : « Le nsua est un peu similaire à la dot espagnole mais ce n’est pas la dot. Il ne peut être traduit, c’est un symbole d’union »[8]. Cet acte traduit l’union entre deux familles, deux tribus, deux peuples voire plusieurs groupes sociaux. Si un guinéen se marie avec une ivoirienne, cette union est non seulement entre deux personnes ou deux tribus, mais aussi et surtout entre deux pays ou deux nations. Le mariage n’est pas un simple jeu d’union comme l’on pourrait le constater aujourd’hui dans différentes sociétés africaines voire du reste du monde.

          En clair, « le mariage n’est pas une plaisanterie, il ne peut être réglé par ceux qui ne rêve que de cinéma, de cigarettes et bals». (S. Badian, 1976, p.55). Le mariage semble avoir perdu son sens réel dans le monde contemporain. Plusieurs hommes se réfugient derrière la tradition pour fuir leurs responsabilités en qualité d’époux. Le comportement de certains personnages (Santiago et le Public), de la communauté de Medzap, justifie clairement cette idée. Pour ces derniers, l’on devrait infliger une forte somme comme « nsua » au prétendant Andrés dans l’optique de répondre à leurs besoins familiaux. Face à ce fléau qui mine la société la population de Medzap, le dramaturge Pancracio lance un appel par le canal des personnages Pedro et Miguel. Ce cri de cœur qui consiste à un changement de comportement relatif à la mauvaise interprétation des lois coutumières liées au mariage traditionnel de la Guinée bantoue. La dot ou le « nsua », en effet, ne consiste pas à profiter de la somme pour réaliser les projets familiaux. Cette loi coutumière ne consiste pas non plus à vendre la fille ou la femme ; encore moins à la réduire en « un objet d’échange » (B. Pierre, 1998, p.39). Plus l’homme paye une somme importante pour le « nsua », moins il considère la femme. C’est surement dans ce sens que Pedro a envisagé de prendre seulement 50.000francs sur les 600.000 francs proposés par Andrés son gendre. Cette réplique entre Santiago et Pedro le confirme en substance :

             SANTIAGO : exactement ! Exactement ! Tu l’as même dit qu’il n’y a pas de Prix fixe. Alors, chacun peut fixer le prix qu’il veut.  

             PEDRO : c’est exact ! Pour cela je ne recevrai pas plus de 50.000 francs pour Jesusa. Je ne peux pas parce qu’elle est mon sang, ma vie. Une fille qui vaut plus que tout l’or du monde. Elle est ma fille, votre fille. Et je ne la vendrais jamais.

             SANTIAGO : tu fais perdre une bonne Somme à la tribu. Ils donneront 600.000 pour Jesusa[9].  (E. M. Pancracio, 1990, pp.39-40).  

Le “nsua”, en son sens propre, est destiné à valoriser la coutume bantoue. Il est institué pour donner plus d’estime à la famille et à la femme en particulier. Il est bien vrai qu’en certaines situations, la dignité de la femme africaine est foulée au pied par les hommes tels qu’Irgundio dans Los hombres domésticos[10]. Et même Dardigna a eu à laminer la femme en la traitant d’« un objet évaluable et interchangeable, circulant entre les hommes au même titre qu’une monnaie ».  Une telle assertion est soutenue par Santiago et défendue par Miguel et Pedro. À travers ces deux personnages, le dramaturge refuse que l’on traite la femme d’un objet au centre de l’économie des biens symboliques.

          À vrai dire, la femme est celle-là qui détient les secrets de la tradition. Raison pour laquelle elle ne peut, en aucun cas, être vendue. Mais bien avant Pancracio, Meillassoux soutenait déjà que « le seul objet équivalent à une femme pubère est une autre femme pubère »[11]. (C. Meillassoux, 1986, p.12-15). Selon la tradition bantoue, décrite dans le corpus, l’on peut s’acheter une chèvre. Mais la femme ne s’achète pas. Elle ne peut être remplacée que par une autre femme. Pedro l’avoue clairement que:

PEDRO- la seule et l’unique chose qui puisse remplacer la femme, c’est une autre femme. Et la garantie d’un tel transfert est bien le « nsua, qui ne signifie pas l’achat-vente. Car, comme l’on le dit, acheter est différent de valoriser. L’on peut dire « akus ntoma » : acheter une chèvre ; « yavek miná » : valoriser une femme.[12] (P. Esono Mitogo, 1990, pp.42-43)

 

Cette vision de Pedro sur la dot est partagée par l’historien et enseignant-chercheur Laurent Feller. Ce dernier va plus loin que Pedro en préconisant que cette manière de concevoir la dot soit bannie de toutes les cultures sans exception. Dans son analyse il soutient que la dot, qu’elle soit provenue de la famille de l’homme ou de la femme, est avant tout la

Fortune de l’épouse et non prix de l’épouse : il faut d’emblée bannir tout terme qui pourrait donner force à l’idée que les transactions matrimoniales ont quelque chose à voir avec l’achat et la vente et qu’elles ont pour fonction de faire circuler entre deux groupes des femmes contre des biens : on échange en effet des choses contre des choses et des femmes contre des femmes. Tout ce qui, de près ou de loin, pourrait entretenir une confusion doit être éloigné, afin que la réflexion ne s’en trouve pas déformée ou bloquée. La dot, qu’elle soit directe ou indirecte, est en effet une institution fort complexe que les anthropologues scrutent depuis longtemps et qui doit être interprétée à la lumière de leur apport théorique et empirique. (L. Feller, 2002, pp.18-125).

Le repositionnement de la dot engage toutes les parties prenantes. Chaque individu, peu importe sa situation sociale et son train de vie, est appelé à mettre une barrière à la propagande du mauvais usage de la dot. Feller au niveau scientifique, met la lumière sur le travail abattu par des chercheurs. Quant à Pancracio, il fait descendre les personnages dans le fin fond de la société bantoue pour démontrer comment, malgré la plainte et la résistance du peuple de Medzap, Pedro a réussi à  le convaincre pour restaurer la valeur liminaire du « nsua » et de la dot. Le fait de défendre le « nsua » ou la dot en prenant une modique somme en guise de redonner son sens originel est un acte de bonne coutume dans la culture guinéoéquatorienne.

 

  1. L’origine et la fonction sociale de la dot

          La dot comme tout autre fait culturel à une explication historique voire mythique dans la civilisation des humains. Pour montrer le bienfondé de cette pratique ancestrale, le dramaturge instruit ses personnages à donner l’origine et la raison d’être de la dot dans la société bantoue de la Guinée Équatorial. C’est pourquoi, Miguel, le chef du village, recadre le débat autour de la dot en toute sagesse :

MIGUEL. – il se peut que tu sois dans le vrai. Mais, depuis lors, nous devrions tous savoir comment beaucoup de choses ont commencé, quelle est leur signification et pourquoi les pratiquons-nous… le « nsua », selon la version de Ondo, est né de cette façon : les sept enfants d’Africara et leurs descendants se sont constitués dans la dernière phase migratoire dans la région du Sanaga ou ils allaient se séparer définitivement. Au cours de leur séparation, ils se convertiraient en des étrangers entre eux. Car, ils avaient procréé abondamment. Ils avaient de nombreux enfants, de petits-enfants. Chacun est parti avec son groupe, à la recherche de terres fertiles. Étant nombreux, ils ne reconnaissaient pas[13]. (P. Esono Mitogo, 1990, p.40).

          La croissance démographique de la descendance d’Africara[14] a provoqué un changement dans leur vécu quotidien ; surtout au niveau de leur relation fraternelle. À force de s’accroître, ils ont fini par ne plus se reconnaître. Dans ces conditions, il faudrait trouver, tout de suite une solution pour ne pas perdre de vue leur lignée. D’où l’instauration d’une convention matrimoniale qu’est la dot. Le lien sceller entre les descendances d’Africara a des vertus dans leur vie sociale.

          La fonction sociale de la dot peut se situer à plusieurs niveaux. Ici nous nous focaliserons sur les aspects évoqués par le dramaturge. L’accord signé entre les familles des futurs époux permet d’éviter la perte des traces de ces différents peuples. Pour y parvenir, les enfants d’Africara et leurs descendants ont conclu un principe de base tel que prescrit dans les répliques qui suivent :

ALGUACIL. – donc pour éviter cela, ils se réunirent pour trouver une solution. Après plusieurs propositions, ils conclurent que le meilleur souvenir entres les différents frères était de partir avec une personne. Chaque enfant d’Africara devait emmener un fils de son frère, son propre neveu.[15] (P. Esono Mitogo, 1990, p.40)

          De cette réplique transparait clairement la consolidation du lien de parenté entre les peuples d’alors. Mais la compréhension et la recevabilité de ce fait culturel parait très compliqué pour ceux qui ne sont pas encrés dans la culture bantoue. Pour rendre ce système plus compréhensif et logique, les sages tiennent à enseigner le grand public et surtout les jeunes qui veulent comprendre leur culture. D’où le transfert de la tradition bantoue à la jeune génération tel que clarifié dans la suite des répliques :

ALGUACIL. – ce fut ainsi. Mais ils rendirent compte d’un autre détail. Ils se rendirent compte que l’homme ou un homme ne garantissait pas suffisamment une telle relation. Ils virent que la femme avait la possibilité de se multiplier beaucoup. Si elle même mourait, ses enfants continueraient à constituer son souvenir et continueraient à représenter leurs mères. La femme donnerait des enfants, et ceux-ci d’autres enfant, et ainsi de suite… pour cela ils conclurent que le souvenir interminable qu’un frère puisse avoir de l’autre était une fille. Une femme qui, en plus d’être une nièce, serait la femme de son oncle paternel. […] Tu verras aussi que la tradition interdit le « nzamádulu »[16]. Mais cela se fut plus tard, quand les tribus aient cru et qu’ils aient plus de personnes[17]. (P. Esono Mitogo, 1990, p.41)

 

          Cet extrait démontre le fondement historique et culturel de la dot dans la société bantoue. L’accord conclu entre les enfants d’Africara, met la femme au centre de la vie sociale. Car, elle est la bibliothèque de la sagesse culturelle. L’ignorer dans certaines situations importantes, c’est mettre en péril la société toute entière. C’est pourquoi les enfants d’Africara se sont très vite remis en cause pour redonner la place méritée à la femme. Si le dramaturge guinéen s’est évertué à mettre un accent sur la pratique de la dot au pays bantoue, c’est que ce procédé culturel connait de nos jours un danger permanent. Un danger qui met en péril le système matrimonial africain. Jetant un regard critique sur l’interprétation actuelle de la dot par les habitants de medzap, l’on constate qu’il y a lieu de prendre une position afin de dénoncer et d’agir. Selon certains personnages tels que l’ensemble de la population de Medzap, dirigé par Santiago, de par leur agissement habituel, ont tordu le cou à la dot. La généralisation de la mauvaise conception de la dot, dans leurs habitudes, est devenue une règle pour eux. Et pourtant, cette règle est contraire à celle du système dotal telle que prescrite par la tradition bantoue. À force de répéter les mauvaises pratiques vis-à-vis de la dot, par l’ensemble de la population de Medzap, la loi authentique cède la place au faux. Et ce, pour satisfaire aux besoins ventraux, égoïstes et individuels tels que décrits par les répliques ci-après :

MIGUEL. – très bien. Je pense que nous avons certaines obligations et responsabilités, vous et nous. Parait-il que récemment, les gens employaient le mot « tradition » pour faire ce que l’on a envie, ce que l’on ne doit pas faire, parfois même pour aller contre la raison et ce qui est raisonnable. Bon nombre de personnes âgées, pour convaincre les jeunes disent que ceci ou cela est la tradition. Parlant de l’argent de popote, par exemple, les femmes estiment que c’est la tradition, « muaná-bidjí »

PÚBLICO. – Oui !!!

MIGUEL. – certains parents, surtout les hommes, pour satisfaire leurs ambitions personnelles exagèrent le montant du « nsua ». Les sommes montent jusqu’aux astres. Et quand on veut leur donner des conseils sur un tel procédé, ils disent que le « nsua » est…

             PÚBLICO.- Traditionnel !!![18] (P. Esono Mitogo, 1990, p.38).

          Selon Miguel, l’un des sages de Medzap, la mauvaise foi des uns et des autres a dénaturé le sens vrai et authentique de la dot. Nombreux sont ceux qui réfugient derrière le mot tradition pour tordre le cou à la loi coutumière qui est sensée légitimer certaines pratiques ancestrales en l’occurrence la dot. Pire, les personnes averties, qui connaissent très bien le bienfondé de cette vieille tradition, sont ceux-là même qui enveniment la situation. Au lieu de servir d’exemple aux jeunes générations, ils profitent de la tradition pour répondre à leurs besoins nocifs et maléfiques. Cette manière de concevoir est partagée par Santiago quand il se préoccupe de ce qu’Andrés doit payer pour la dot de Jesusa. Cela se précise à travers l’interrogation suivante : « apportera-t-il aussi de la nourriture, de la boisson, etc. ? »[19] (P. Esono Mitogo, 1990, p.37). Au lieu de penser à la lourde tâche de cette convention qui va unir toute une multitude de société, de cultures et de problèmes, il ne se soucie que de son ventre.

           Ce mauvais usage de la tradition étant généralisé dénature le vrai sens de la dot et certains l’appréhendent comme une source commerciale. Le système dotal est devenu, dans le monde contemporain, un réseau de commercialisation de la femme. La société bantoue, décrite dans le corpus, n’en fait pas exception. Certains personnages, Santiago et le Public, sont des adjuvants de cette mauvaise orientation de l’objectif de la dot. Dans l’optique de survenir à la réalisation de leur projet, ils tentent, avec la dernière énergie, de convaincre Pedro afin d’exiger une somme exorbitante à Andrés, le prétendant de Jesusa. Leur objectif est que Pedro demande une forte somme ou qu’il accepte la somme prévue par Andrés. Ce qui est contraire aux préceptes de leur tradition. Cela va susciter un conflit entre les différents personnages comme l’on peut le constater dans ces lignes qui suivent :

             SANTIAGO. – Mais qu’est-ce qui vous arrive ? Vous dites des choses drôles cette nuit : 600 000 francs de dot sont-ils exagérés pour une femme comme Jesusa, tandis qu’il y a des gens qui demandent 1 à 3 millions ? Ce n’est pas parce que nous sommes aussi modernes que nous devons oublier la bonne tradition !

             PÚBLICO. – c’est vrai ! Santiago dit la vérité ! Vive la bonne tradition !!! Santiago dit vrai !!! […][20] (P. Esono Mitogo, 1990, pp.37-38).

          À travers ces différentes prestations antagoniques, deux positions clés se présentent. Santiago, soutenu par le Public, imite la mauvaise tendance par ignorance. Quand il dit « Ce n’est pas parce que nous sommes aussi modernes que nous devons oublier la bonne tradition! ». (P. Esono Mitogo, 1990, pp.37-38). Il pense avoir raison de sa manière de concevoir le nsua. Et pourtant c’est lui et sa suite qui sont dans l’erreur sans le savoir. Mais leur erreur n’est à condamner. Car, cette mauvaise conception du système dotal ne date pas de leur génération. Comme précisé plus haut, les personnes âgées sensées leur indiquer le droit chemin, sont ceux-là qui mènent la danse et les jeunes exécutent leurs pas. Ce qui pourrait faire comprendre qu’il y a eu une mauvaise transmission de cette coutume bantoue à la nouvelle génération qui en fait une règle morale à l’appréciation du grand public. Mais Miguel et Pedro ont su s’opposer, avec sagesse, à cette pratique. Prenant Santiago a ses propres mots, ils les exhortent au retour à la bonne pratique traditionnelle. De là, naît une forme de « conflit dramatique qui résulte des forces antagonistes du drame ». (P. Pavis, 19, p.65). Il met aux prises Santiago appuyé par le Public avec Miguel soutenu par Pedro et Alguacil, face au montant à payer pour la dot de Jesusa.

 

Conclusion                                                                                                                      

En somme, l’on peut retenir que la dot est le transfert de biens matériels, symboliques et immatériels lors des déroulés matrimoniaux.  Elle se présente sous deux angles. Soit du père à la fille (la dot directe) soit du futur mari à la femme ou aux parents de la femme (la dot indirecte). Peu importe son origine, la dot doit être un réel facteur de liens interfamiliaux et encourager les jeunes générations à pouvoir s’engager dans le système matrimonial sans contrainte aucune. L’évocation des concepts « dot » ou « nsua » est certainement une interpellation de tout individu de ne pas perdre de vue l’origine symbolique de ces procédés matrimoniaux. Aussi, le dramaturge voudrait exhorter les siens voire l’humanité à sortir la dot, en tant que qu’un acte culturel, du caractère d’abus économique actuel. Cet agissement qui donne l’impression d’une compensation de la perte subite par la famille de l’homme et surtout de la jeune fille. Car, si cette pratique qui garantit le mariage a perduré, c’est parce qu’elle revêt aussi une valeur culturelle, une légitimité légale et religieuse. D’où une invitation à repenser les pratiques liées à la dot. Cette pratique ancestrale qui « est le symbole d’union d’un homme et d’une femme pour former une synthèse d’amour au pays fang »[21]. (Interview avec Donato NDONGO).

Références bibliographiques

ÁVILA LAUREL Juan Tomás (1994). Los hombres domésticos, Centro Cultural Hispano Guineano: Malabo.

BADIAN Seydou (1976). Sous l’orage.  Présences Africaines : Paris.

BOURDIEU Pierre (1980). La domination masculine. Seuil : Paris.

Conseil Pontifical « Justice Et Paix » (2008). Compendium De La Doctrine Sociale De L’église, CEDA/NEI : Abidjan.

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NSUE ANGÜE María (1981). EKOMO. UNED: Madrid.

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ZIOMEK Henry, el mayorazgo y la dote en el teatro de Lope De Vega, www.Cerantesvirtual.com.  Consulté le 15 juin 2021

[1] Texte d’origine. “La costumbre es el hombre”. 

[2] Texte d’origine. “los rasgos principales de aquella variedad están presentes en la comedia […] el autor ha salpicado su obra de sentencias y ha reflejado las costumbres de su pueblo”.

[3]Texte d’origine. “Creo que no hay derecho de pintar mal nuestra tradición, me refiero a la buena tradición, porque eso es permitir que los que no nos conocen profundamente halen mal de nosotros y condenen lo bueno y sagrado nuestro que, a veces, dejamos malamente”.

[4] Texte d’origine. SANTIAGO:- ¿Y qué más da? ¿Acaso los extranjeros no practican las mismas cosas que nosotros? ¿Qué es lo que ellos llaman dote?

MIGUEL: Pues la dote no es nuestro «nsua».

SANTIAGO.- ¿Entonces qué es?

[5] PEDRO. – “Pues… la palabra «dote» del español procede del latín y significa para los europeos el caudal, los dineros y la cantidad de bienes que la familia suele dar a su hija cuando se va casar o después de haberse casado, para que vaya a vivir bien y feliz con su esposo y futuros hijos […]”.

[6]

[7] Texte d’origine. MIGUEL: Nuestro «nsua» fue sólo un símbolo tradicional; se podía dar un sable, un cuchillo, un metal o una herramienta como «nsua». El «nsua»  se daba en presencia de dos tribus porque el casamiento de la mujer constituía  una verdadera unión de tribus, también debo subrayar de que no había una cuantía  estándar.

[8] Texte d’origine: «el nsua es tan poco equivale a la dote española pero no es la dote. No se puede traducir. Es un símbolo de unión».  Entretien entre N’GUETTIA Narcisse et Donato NDONGO le 15 juin 2021, à l’Université Alassane Ouattara de Bouaké-Cote d’ivoire.

[9] Texte dorigine. SANTIAGO: Justamente, justamente. Tú mismo lo has dicho; no había un precio estándar. Entonces, cada uno puede poner el precio que quiera.

             PEDRO: Exactamente. Por eso yo no recibiré por Jesusa más de 50.000 francos. No puedo porque es mi sangre, mi vida, una chica que vale todo el oro del mundo. Es mi hija y vuestra hija, pero no la vendría jamás.

                SANTIAGO: Haces perder a la tribu una buena suma. Iban a dar 600.000 por Jesusa.

[10] Juan Tomás ÁVILA LAUREL, Los hombres domésticos, Centro Cultural Hispano Guineano, Malabo, 1994. Le dramaturge Juan Tomas Ávila Laurel, met la femme (Melissa et la femme du chef) dans une situation dans laquelle les injures et les humiliations sont ses qualificatifs.

[11] C. Meillassoux, Anthropologie de l’esclavage, Paris, 1986 (éd. 1998), pp. 12-15.

[12] Texte d’origine. PEDRO- “La única cosa que puede reemplazar a la mujer solo es otra mujer. Y la garantía de tal transferencia es también el “nsua”. El cual no significa compraventa porque, como lo dice alguien, comprar es diferente que valorar. Se dice “akus ntoma”, comprar una cabra; “yavek miná”, valorar una mujer”.

[13]MIGUEL. – no sigamos hablando de dinero, me molesta oír hablar de dinero, de dote, o de «nsua» en estos momentos. La gente ignora cómo empezó el «nsua» y los valores que tiene.

SANTIAGO. – Se diría que quieres darnos lecciones de cultura, hermano Miguel.

MIGUEL. – Quizás estés en lo cierto. Pero, desde luego, todos deberíamos saber cómo empezaron muchas cosas, que significan y por qué las hacemos… el «nsua», según la versión de Ondo, nació de la siguiente manera: los siete hijos de Africara y sus descendientes comprobaron en la última fase de sus migraciones en la región del Sanaga de que iban a separarse definitivamente. Al separarse, se convertirían, en extraños entre sí, porque procreaban abundantemente y ya tenían muchísimos hijos, nietos y biznietos, cada uno se iría con su grupo en busca de tierras fértiles. Al ser muy numerosos ya no se conocerían.

[14] Africara : ce personnage a été utilisé par Mria NSUE et repris par Pancracio Esono pour expliquer le fondement migratoire du peuple bantou. Maria NSUE ANGÜE, EKOMO, UNED, Madrid, p.159.

 

[16] L’inceste

ALGUACIL. – así fue. Pero se dieron cuenta de otro detalle: se dieron cuenta de que el hombre o un hombre no garantizaba suficientemente tal relación. Vieron que la mujer tenía la posibilidad de multiplicar mucho; si ella misma se muriera, sus hijos seguirían constituyendo su recuerdo y seguirían representando a sus madres. La mujer daría unos hijos, y estos otros hijos y así sucesivamente… por eso concluyeron que el recuerdo interminable que un hermano podía llevarse del otro era una hija. Una mujer que, además de ser una sobrina, sería también la esposa de su tío padre.

[…] Veras también que la tradición prohíbe el «nzamádulu», eso fue más tarde, cuando crecieron las tribus y hubo más gente.

[18]Texte d’origine. MIGUEL. –“Muy bien. Creo que tenemos ciertas obligaciones y responsabilidades, ustedes y nosotros. Parece que últimamente la gente emplea la palabra «tradición» para hacer lo que a uno le da gana, para hacer lo que uno no debe, para ir a veces contra la razón y lo razonable. Muchos mayores, para convencer los jóvenes dicen que esto o aquello es tradicional; las mujeres al hablar del dinero de comida, por ejemplo, dicen que es tradicional, «muaná-bidjí”.

PÚBLICO. -¡¡¡Sí!!!                            

MIGUEL. -Algunos padres, los varones sobres todo, para satisfacer sus ambiciones personales exageran las sumas del «nsua»; hasta los astros suben las cantidades, cuando se les quiere aconsejar sobre tal proceder dicen que el «nsua» es…

PÚBLICO. -¡¡¡Tradicional!!

[19] Texte d’origine. ¿Traerá también los alimentos, bebidas, etc.?

SANTIAGO. – ¿pero qué os pasa? Decís cosas raras esta noche: ¿600 000 francos de dote son exagerados para una mujer como Jesusa, cuando hay gente pide de 1 a 3 millones? ¡No por ser ya tan modernos debemos olvidar la buena tradición!

PÚBLICO. -¡¡¡con razón!!! ¡¡¡Santiago dice la verdad!!!

                               ¡¡¡Viva la buena tradición!!! ¡¡¡Santiago habla bien!!!             

[21] Texte d’origine: «la dote es el símbolo de la unión de un hombre y una mujer para formar una síntesis de amor en el pueblo fang». Entretien avec Donato NDONGO le 15 juin 2021, à l’Université Allassane Ouattara de Bouaké-Cote d’ivoire.

 

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